« From dark to dusk »

 

L’exposition « From dark to dusk » que présente la galerie Claire Gastaud réunit un ensemble de travaux couvrant une période de recherche picturale d’à peu près quinze années.

Le support de ces peintures varie de la toile au panneau de bois, cependant le medium est toujours le même : l’acrylique. Elles sont de dimension modeste, pour la plupart, et l’on pourrait même ajouter qu’elles sont de format carré pour les plus récentes.

Le choix du format carré a pour objectif d’insuffler à la série une sorte de scansion chromatique.

En effet, en peignant ces petits panneaux, j’avais en tête une approche mélodique, à savoir que ces tableautins pourraient correspondre entre eux comme le feraient les notes d’une partition musicale.

Savamment agencées sur les murs de la galerie Claire Gastaud par Jean-Charles Vergne, ces peintures semblent s’opposer de prime abord, puisqu’on y trouve tantôt des paysages à caractère figuratif, tantôt des motifs qui s’apparentent bien plus à une forme d’abstraction.

Et pourtant, toutes ces peintures s’articulent autour de quelques thèmes bicéphales : l’absence/la présence, la disparition/l’apparition, l’oubli/la réminiscence, l’effacement/le surgissement.

Autant de termes qui renvoient à une vision d’un monde en train de se corrompre, de se déliter. Dans le premier cas, ce sont des fragments de paysages qui s’affaissent sur eux-même, ou qui exsudent des bribes de souvenir, dans le second cas, ce sont des décors qui sont envahis par des phénomènes lumineux aux intentions douteuses.

Dans les deux cas, c’est le constat d’un univers qui assiste impuissant ou indifférent à l’irruption d’éléments mystérieux, et peut-être même inquiétants.

Pour contrebalancer l’étrangeté de ces images ambigues, les peintures géométriques tentent, grâce à leur champs colorés, de retenir les souvenirs de lieus qui ne résonnent plus que dans la chambre noire de notre crâne, de régénérer ce qui peut encore être sauvé de l’oubli.

A l’inverse des images de dissolution et d’érosions citées

précédemment, je souhaiterais que la structure apaisée des grilles agisse sur le spectateur comme des filets de pêche – mais dans une partie de pêche un peu particulière, et dont l’issue pourrait être malheureusement semblable à celle qu’à connue ce vieil homme du roman d’Hemingway : l’échec.

Face à l’oblitération programmée de nos souvenirs, je vous invite avec ces petites peintures à faire un pas de côté, et à mener un combat silencieux – qu’importe, si vous ne ramener qu’une minuscule pépite de vos souvenirs les plus chéris.

Clermont-Fd, le 10 avril 2021

Jean-Charles Eustache